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Archives Canada

La petite-fille de quelqu’un

Si Hubert Lenoir chante La fille de personne, je peux, de mon côté, chanter que je suis « La petite-fille de quelqu’un », mon grand-père étant nul autre que Gratien Gélinas, l’homme que l’on surnomme le grand-père du théâtre québécois. Il est encore difficile de s’imaginer qu’avant lui, les seules pièces qui étaient produites ici étaient des oeuvres françaises, jouées avec un accent français. Comment le public pouvait-il se reconnaître -et être fier de ses racines- en n’écoutant que des histoires venues d’ailleurs? Pensez-y. Ce dont nous sommes si fiers, notre industrie télévisuelle, théâtrale, cinématographique (et radiophonique!) qui nous distingue n’aurait peut-être pas autant d’envergure aujourd’hui sans son apport.

Quand nous étions petits, mes cousins et moi comprenions déjà l’importance de cet homme. Tous écrasés les uns sur les autres sur le divan de sa toute petite salle de télévision dans la maison d’Oka, nous regardions ensemble le film de Tit-Coq ou les archives vidéos des Fridolinades (certains d’entre nous récitaient même des sketchs par coeur). Nous étions fascinés par l’homme de théâtre qu’il était avant même de devenir notre grand-papa.

Bien que la fascination soit restée pour nous tous, l’une de mes cousines, Anne-Marie Sicotte (Les accoucheuses), a dédié une partie de sa vie à mettre en lumière la carrière de notre grand-père. Après avoir écrit sa biographie La ferveur et le doute et plusieurs bouquins à son sujet, elle vient de diriger la publication de L’intégrale illustrée des pièces de théâtre: qui comprend entre autres Tit-Coq (1948), Bousille et les Justes (1959), Hier, les enfants dansaient (1966), et La passion de Narcisse Mondoux (1986). Cette dernière est la seule pièce que j’ai eu le plaisir de voir Gratien jouer, juste avant que sa mémoire ne commence à flancher. Dans un geste romantique, il avait écrit cette pièce pour pouvoir monter sur les planches une dernière fois avec sa femme, l’actrice Huguette Oligny. Par ailleurs, ses revues sur scènes (entre autres Les Fridolinades) n’y sont pas, ayant déjà été publiées auparavant.

« Qu’est-ce que la dramaturgie québécoise doit à Gratien Gélinas ? Tout. C’est lui la source. » Paul Lefebvre

Bien que je sois bien fière de mon grand-papa, je partage mon admiration avec bien des Québécois qui ont eu le plaisir d’être touchés par son oeuvre. Aujourd’hui, un objet significatif est à leur disposition pour le redécouvrir.

Figure marquante de l’histoire des arts de la scène au Québec, Gratien Gélinas est né en 1909 à Saint-Tite. Issu de parents sachant conter une histoire et faire rire, fasciné par l’art de la déclamation, Gélinas cultive son talent de « p’tit comique » dans les salles paroissiales, et son talent d’acteur au sein de troupes de théâtre amateur. Ce don le conduit jusqu’à l’écriture d’une série radiophonique qui propulse son personnage de Fridolin sur les ondes, en 1937. Stimulé par ce succès, il écrit, met en scène et produit la série des neuf grandes revues d’actualité, Fridolinons, entre 1938 et 1946.

Première grande vedette de la scène québécoise, Gélinas écrit ensuite quatre pièces de théâtre. Ses personnages bien ancrés dans le Québec d’alors, ses succès retentissants et son acharnement à constituer une dramaturgie nationale font de lui un véritable défricheur, le grand-père du théâtre canadien. Le dramaturge se passionne également pour le septième art, allant jusqu’à diriger le premier court métrage couleur parlant au Canada, « La Dame aux Camélias, la vraie », en 1943. Enfin, en 1957, il fonde la Comédie Canadienne, ambitieux complexe théâtral qui abrite aujourd’hui le Théâtre du Nouveau Monde. Créateur fascinant par sa complexité et sa profonde humanité,

Gratien Gélinas figure parmi les géants de l’histoire des arts au pays lorsqu’il décède, en 1999.

Photos: Archives Canada

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